D. MELANGEURS, RECEPTEURS, SYSTEMES,
ET TEMPERATURES DE BRUIT

Résumé  L'affaiblissement de conversion et la température de bruit d'un mélangeur peuvent être donnés en simple bande ou en double bande ; mais il y a deux définitions différentes de la température de bruit en simple bande. Cette différence se retrouve dans les définitions relatives à un récepteur. La définition de la température de système dépend de l'usage du radiomètre. Plusieurs méthodes, aucune n'étant parfaite, permettent de mesurer les caractéristiques essentielles d'un récepteur.

 

 

 

 

 

"Simple bande ou double bande ?" Combien de fois entend-on cette interrogation à pro­pos d'une température de bruit ou de l'affaiblissement de conversion d'un mélangeur ?

En fait, on laisse trop souvent à son interlocuteur ou même à son lecteur le soin de devi­ner l'unicité ou la dualité, si l'on peut dire, de la bande considérée. De plus, on précise très ra­rement les conventions ou définitions employées. Car il peut y avoir différentes définitions pour un même terme. Ce chapitre tente de clarifier les choses. Il reflète notre opinion person­nelle, mais nous nous référons à maintes reprises à d'illustres auteurs.

 

 

 

 

 

1. TEMPERATURES DE BRUIT DES MELANGEURS

Nous avons vu au chapitre A qu'un mélangeur transposait deux bandes de radiofré­quences vers une bande à fréquence intermédiaire. Nous désignons toujours par S et I les deux bandes et par FI la bande à fréquence intermédiaire. Nous ignorons toutes les autres fré­quences qui pourraient intervenir dans le fonctionnement du mélangeur, en particulier les har­moniques d'ordre supérieur produites par la diode.

La première définition est celle de l'affaiblissement 1 du mélangeur pour chaque bande. LS (respectivement LI) est le rapport de la puissance disponible à l'entrée du mélangeur dans la bande S (resp. I), sur la puissance, provenant de cette bande, qui est délivrée à la sortie du mélangeur. Cet affaiblissement est appelé affaiblissement simple bande (SB), en anglais single-sideband (SSB). On parle aussi de bande latérale unique (BLU).

On définit ensuite l'affaiblissement double bande (DB), en anglais double-sideband (DSB) :

 

 

                                                                                     (1)

 

 

Cette définition peut s'interpréter ainsi : si la température d'entrée est la même dans les deux bandes, et si l'on néglige le bruit ajouté par le mélangeur, LDB est simplement le rapport de la température d'entrée sur la température de sortie.

Si LS = LI = LSB, il vient : LDB = LSB/2, ou, en dB, la relation bien connue : LDB = LSB – 3 dB.

Il faut faire une remarque sur l'affaiblissement de conversion d'un mélangeur. LM vient d'être défini pour une bande de fréquence, simple ou double. C'est en fait la moyenne des af­faiblissements pour toutes les fréquences de la bande. Nous verrons que LM peut être mesuré à une fréquence particulière (ou plutôt sur une bande étroite), ou bien sur l'ensemble de la bande.

 

Voici alors les trois façons de voir le mélangeur comme une "boîte noire" (figures 1 à 3). Te désigne la température d'entrée du mélangeur, dans la bande S ou I, et Ts la tempé­rature de sortie. C'est bien sûr la bande S, le cas échéant, qui est "utile" : S signifie alors signal et non supérieure..

 

 

Figure 1 : simple bande (définition courante).

 

 

 

Figure 2 : simple bande (définition Räisänen).

 

 

 

Figure 3 : double bande.

 

Les deux premières figures définissent chacune une température de mélangeur simple bande. Le premier cas correspond à la définition courante (notation : -C) et le deuxième à la définition proposée par Räisänen [1980] et reprise par Tiuri & Räisänen [Kraus, chapitre 7, 1986] (notation : -R). La troisième figure définit une température de mélangeur double bande.

Les relations entre les trois cas sont les suivantes :

 

 

                         

 

                                                                                  (2)

 

 

La "philosophie" des figures 2 et 3 est la suivante :

– Soit les deux bandes reçues sont utiles, et alors généralement la température d'entrée est la même dans les deux bandes (cas des canaux 1 à 5 et 8 à 10, voire 6 et 7 de Météosat). On écrit alors tout simplement :

 

 

                                                                              (3)

 

 

– Soit une seule bande est utile, la bande du "signal" (S) ; tout ce qui n'est pas TeS est considéré comme étant du bruit et est donc inclus dans TMSB-R, et c'est LS qui est l'affaiblissement de conversion "significatif" du mélangeur. On écrit donc :

 

 

                                                                            (4)

 

 

Ces deux définitions permettent de traiter le mélangeur comme une boîte foncièrement identique à un amplificateur de gain G = 1/L et de température additionnelle de bruit TM. La définition de Räisänen, pour le cas simple bande, n'est pourtant pas la plus courante. L'inconvénient essentiel de cette définition est que la température de bruit du mélangeur dé­pend de TeI, température d'entrée pour la bande I. Cette température de bruit n'est donc plus, en toute rigueur, une caractéristique du mélangeur. De la relation (2), nous tirons :

 

 

                                                      (5)

 

                                 (6)

 

 

TMDB et TMSB-C sont, quant à eux, indépendants de la température d'entrée Te. C'est la relation (5) que l'on rencontre le plus couramment dans la littérature (Carlson et al. [1978], Maas [1986] par exemple). Elle revient à négliger TeI, ou à ne pas oublier de le rajouter pour des calculs précis, au moment opportun.

Si LS = LI, on obtient la relation bien connue :

 

 

                                                                                       (7)

 

 

Alors qu'il faut écrire, pour la définition de Räisänen :

 

 

                                                                             (8)

 

 

Enfin, si l'on dispose d'un mélangeur dit simple bande, c'est-à-dire pour lequel on a réussi à présenter une impédance purement imaginaire pour la bande image, on a LI = ∞ et :

 

 

                                                                             (9)

 

 

Signalons que l'on rencontre souvent, dans la littérature (depuis Kerr [1979]), des rela­tions théoriques liant la température de bruit de la diode TD aux températures de bruit du mé­langeur.

 

Enfin, quelques mots sur les facteurs de bruit. Ici encore règne une grande confusion. Voici les définitions suivant les auteurs (T0 = 290 K ; nous omettons les indices M) :

 

 

Maas [1986], Carlson et al. [1978] :

 

                                                                                   (10)

 

 

Définition IEEE pour une bande simple (d'après Maas [1986]) :

 

                                                                                 (11)

 

 

Autre définition [Maas, 1986], sans doute pour TeS = TeI et LS = LI :

 

                                                                                 (12)

 

 

Carlson et al. [1978] :

 

                                                                        (13)

 

 

Quant à Tiuri & Räisänen [Kraus, 1986], ils choisissent implicitement :

 

                                                                                 (14)

 

 

Cette dernière expression, si TeS = TeI = T0 et LS = LI, amène à :

 

                                                                                            (15)

 

 

 

 

(Note de bas de page)

1 : Les termes affaiblissement ou atténuation sont officiellement recommandés pour ce qui est communément appelé "pertes" dans le domaine [Hirel & Moreau, 1984].

 

 

 

 

2. TEMPERATURES DES RECEPTEURS ET DES SYSTEMES

Ajoutons d'abord l'effet de la chaîne FI, de température de bruit TFI. Pour TFI, il n'est pas question de bande simple ou double, puisqu'il n'y a plus que la bande FI.

Sur les figures 1 à 3, cette chaîne FI se place à la sortie. Le calcul d'un nouveau Ts est très simple. En définissant les températures de bruit des récepteurs de façon semblable aux TM des figures 1 à 3 (le gain G de la chaîne FI est à associer à LM), on trouve facilement les rela­tions suivantes, sur le modèle d'une formule bien connue :

 

 

                                                                     (16)

 

                                                                     (17)

 

                                                                        (18)

 

 

Après quelques calculs, on s'aperçoit alors que les formules (5) et (6), et par conséquent aussi les formules (7) à (15), sont aussi valables relativement aux récepteurs, c'est-à-dire en remplaçant tous les indices M par R. D'ailleurs, les définitions du facteur de bruit telles qu'elles ont été données par Carlson et al. et Tiuri & Räisänen (formules (10) et (13) à (15)) concernaient en réalité les récepteurs.

 

La situation se complique grandement lorsque l'on fait intervenir les composants situés en amont du mélangeur.

Appelons LRF l'affaiblissement apporté par ces composants (dans les bandes S ou I sui­vant l'exposant) et T1 leur température physique : nous supposons pour simplifier qu'ils sont tous à la même température. L'affaiblissement LRF est supposé provenir d'atténuateurs, tels que cornets, lentilles, miroirs imparfaits. Si l'on cherche à rejeter la bande image, au moyen d'un filtre Fabry-Pérot par exemple, il ne s'agit plus seulement d'une atténuation. Le calcul exact de Te, température d'entrée du mélangeur, est alors plus complexe que ce que nous al­lons présenter. On ne peut plus dire, en particulier, que toute la chaîne RF est à la température T1.

Nous voulons calculer la température de système, TSys, dont le principal intérêt est d'entrer dans la définition de la sensibilité radiométrique DT. Mais qu'est-ce exactement que la température de système ? C'est la température qu'il faudrait mettre à l'entrée d'un système de réception non bruyant, de même gain G que le système réel étudié, pour obtenir la même tem­pérature Ts en sortie. Mais qu'est-ce que le "gain" du système quand ce gain est différent dans les deux voies, S et I ? Nous allons répondre à cette question un peu plus loin.

La figure 4 montre le schéma complet de la chaîne de réception. La température d'antenne TA peut être différente dans les deux bandes. Nous rajoutons l'indice M pour l'affaiblissement de conversion du mélangeur. Nous séparons les deux voies sur le schéma, bien qu'elles soient physiquement confondues.

 

Figure 4 : chaîne de réception complète.

 

Nous avons porté TM' pour figurer le bruit ajouté par le mélangeur, en sortie. Nous choisissons l'une des trois représentations de la section précédente, par exemple celle associée à la figure 3 :

 

 

                                                                        (19)

 

 

Nous obtenons donc :

 

 

                         

 

                                                                     (20)

 

 

Il faut maintenant distinguer deux cas, suivant qu'une ou deux bandes sont utiles.

 

 

 

2.a. Observations en double bande

C'est le cas le plus fréquent en radiométrie, par exemple lorsqu'on observe ensemble les deux côtés d'une raie spectrale, ou même souvent pour un canal fenêtre ; ou encore, en astro­nomie, quand on s'intéresse à un continuum.

Nous définissons le gain G comme le facteur multiplicatif, entre l'entrée et la sortie du système, de l'information utile. Ici, l'information utile est la température d'antenne dans les deux bandes. D'après (20), et avec TASTAI, nous obtenons donc :

 

 

                                                                       (21)

 

 

Si LRFS = LRFI (cas standard) : G = G/LMDB.

TSys = Ts /G se déduit aisément des relations (20) et (21).

Ce qu'on appelle maintenant le récepteur se compose de la partie RF, du mélangeur et de la partie FI. TRDB est, dans l'expression donnant TSys, la somme de tous les termes où ne fi­gure pas TA. Le lecteur consciencieux (et encore éveillé !) écrira sans peine les lourdes for­mules exprimant TSys et TRDB dans le cas général. Nous nous contentons de donner ici des ré­sultats pour quelques cas particuliers. Les deux premières relations sont très classiques :

 

 

Si TAS = TAI :

 

                                                                                 (22)

 

 

Si, en outre, LRFS = LRFI :

 

                                     (23)

 

 

Si LRFS = LRFI = 1 :

 

                                        (24)

 

 

 

2.b. Observations en simple bande

C'est par exemple le cas, en astronomie, lorsqu'on cherche à détecter une raie d'un nuage moléculaire, ou à en connaître le profil. Sa largeur, quelques MHz au maximum, est bien inférieure à celle d'une raie tellurienne. La bande FI étant toujours de l'ordre de la cen­taine de MHz ou du GHz, la raie est située tout entière dans une seule bande : c'est la bande FI du signal. La bande image est inutile. Il faut ici rappeler que la bande avant détection, qui in­tervient dans l'expression de la sensibilité DT, peut être bien plus étroite que la bande FI : c'est le cas quand il y a un système de filtrage ("banc" de filtres par exemple) en sortie des premiers amplificateurs FI, avant le détecteur. Les canaux résultant de ce filtrage doivent être moins larges que la raie étudiée. L'information utile, provenant de la raie, occupe donc bien toute la bande d'un canal mais pas sa bande image associée.

Le gain G est toujours le facteur multiplicatif de l'information utile. Ici, il s'agit du gain simple bande, soit le facteur multiplicatif de TAS dans (20) :

 

 

                                                                                       (25)

 

 

Là encore, on déduit facilement l'expression complète de TSys = Ts /G de (20) et (25). En bref (voir 2.a pour TRDB) :

 

 

                                (26)

 

 

                                                             (27)

 

 

Dans la situation courante où l'on n'a pas de filtrage de la bande image, avec LRFS = LRFI, LMS = LMI et TAS = TAI 1, on retrouve l'expression classique :

 

 

                                                                           (28)

 

 

Quelquefois on cherche à rejeter la bande image, qui amène un bruit inutile pour la me­sure. Par exemple au moyen d'un filtre Fabry-Pérot (il faut un filtre très sélectif) laissant pas­ser la bande signal et réfléchissant la bande image provenant de l'antenne. Le mélangeur voit alors, dans cette bande image, ce que lui "montre" le Fabry-Pérot, à savoir une source froide ou le ciel à 3 K si l'orientation du filtre est judicieusement choisie. On doit évidemment tenir compte de cette température froide T2 pour calculer précisément TeI, température d'entrée dans le mélangeur pour la bande image. Si le rejet des fréquences images provenant de l'antenne est parfait, le mélangeur voit seulement la température T2 dans la bande image. Avec la simplifi­cation T2 ≈ 0, on parvient à la relation (29), à comparer avec (28) :

 

 

                                                                              (29)

 

 

Pour LRFS = 1 et toujours T2 ≈ 0, TRSB-C vaut, d'après (5) et (16) :

 

 

                                                       (30)

 

 

Quelquefois on cherche plutôt à réaliser un mélangeur simple bande, en faisant en sorte que l'impédance vue par la diode à la fréquence image soit un court-circuit. Pour la version parfaite d'un tel mélangeur, LMI = ∞ et TMSB = TMDB. Si LRFS = 1, on retrouve facilement :

 

 

                                                                             (31)

 

 

                                            (32)

 

 

Les relations (30) et (32) montrent qu'il est plus avantageux (moins bruyant) de réussir à réaliser un mélangeur simple bande que de réussir à rejeter la fréquence image, toutes choses étant égales par ailleurs. Cependant il n'est pas du tout certain que l'on parvienne aisément à obtenir un TMDB et un LMS identiques dans les deux cas !

La comparaison des relations (27) et (28) avec les relations (32) et (31) fait apparaître qu'il est plus avantageux d'utiliser un mélangeur simple bande qu'un mélangeur double bande lorsqu'une seule bande est utile (on s'en doutait...). Enfin, pour en terminer avec les dé­monstrations de choses bien connues, et en revenant aux observations double bande (2.a), les relations (23) et (24) prouvent qu'il ne serait pas avantageux de faire un mélangeur simple bande quand les deux bandes sont utiles (dans (23), LMDB deviendrait LMS, plus élevé).

 

 

(Note de bas de page)

1 : Il faut peut-être ici faire une remarque évidente : les raies étudiées sont en général très faibles. Pour un radiotélescope au sol fonctionnant assez haut en fréquence (≥ 100 GHz environ), c'est le bruit atmosphérique qui contribue le plus à la température d'antenne. L'effet sur TAS de la raie observée est souvent négligeable.

 

 

 

 

 

3. TEMPERATURE DE SYSTEME "ETENDU" (UN EXEMPLE)

L'acception du mot système varie suivant les applications. Nous venons de voir le cas typique d'un radiomètre sur satellite observant la terre, pour lequel l'information utile recueil­lie est la température d'antenne. Nous avons implicitement supposé que cette antenne était par­faite ou du moins que ses imperfections pouvaient être prises en compte dans le terme LRF. Si nous prenons maintenant l'exemple d'un radiotélescope à l'écoute d'un nuage molé­culaire, la température d'antenne n'est pas l'information ultime que l'astronome cherche à ob­tenir 1. Les observations de ce dernier sont perturbées par l'atmosphère, et ce qui l'intéresse plutôt, c'est la température de brillance de la source, donc la température que récolterait une antenne parfaite hors atmosphère (cette température est souvent notée TA* dans la littérature). C'est comme si l'atmosphère et les autres effets perturbateurs constituaient une "boîte" sup­plémentaire, atténuateur bruyant, en amont du radiomètre. Ce qui est appelé le système est donc ici l'ensemble récepteur-antenne-environnement.

Pour connaître la température de bruit de ce système, le plus simple est de calculer la température de bruit à la sortie du récepteur et de la diviser par le gain complet de l'ensemble, c'est-à-dire, en quelque sorte, par le produit de tous les gains (ou inverses des atténuations) rencontrés par la température de brillance TA* de la source, au cours de son passage dans l'atmosphère, l'antenne et le récepteur.

Pour fixer les idées, soit un télescope comme celui de POM 2 [Pagani, 1986], fonction­nant vers 230 GHz. On définit les rendements hMB et hf ainsi : hMB est le rapport de la puis­sance reçue par l'antenne dans son lobe principal (en anglais main beam) sur la puissance to­tale qu'elle fournit au récepteur (ce n'est pas exactement ce que l'on appelle l'efficacité de fais­ceau) ; hf est le rapport de la puissance reçue dans tous les lobes "avant" (forward), prin­cipal et secondaires, sur cette même puissance totale.

Nous supposons que le signal utile TA* remplit tout le lobe principal et ne touche pas les lobes secondaires ; que ces derniers voient le ciel à T = 3 K ; que les lobes arrière voient le sol de température Tsol ; que l'antenne a une efficacité de rayonnement égale à 1, ou alors que sa température physique est aussi Tsol. L'atmosphère est représentée de façon simplifiée par une seule couche de température Tatm et d'épaisseur optique t (incluant l'effet éventuel de l'angle zénithal). Le récepteur a un gain G et une température équivalente de bruit TRDB. L'information utile est située dans une seule bande et nous appliquerons la relation (28) avec TRSB-C = 2 TRDB  2. Dans ces conditions, le gain complet G est :

 

 

                                                                                  (33)

 

 

La température d'antenne (fournie par l'antenne au récepteur) TA est :

 

 

                                                                         [Note :  = ∞]

 

                                                            (34)

 

 

Et enfin la température de système est le rapport de la température de sortie Ts sur le gain complet G :

 

 

                                                                      (35)

 

 

Une autre façon de calculer TSys serait de considérer des "boîtes" d'atténuation bruyantes successives et d'appliquer la relation I.A.-(5) : on a au départ la température TA*, on ajoute l'effet des lobes avant qui voient T, puis de l'atmosphère, puis des lobes arrière avec Tsol et enfin du récepteur avec sa température de bruit.

Comme nous l'avons déjà signalé, ces évaluations de la température de système servent surtout à déterminer la sensibilité DT. Dans le cas que nous venons de voir, c'est le DT sur TA* et non sur TA qui est bien sûr recherché. Il fallait donc bien prendre en compte tout ce qui perturbe TA*.

 

 

(Notes de bas de page)

1 : On pourrait rétorquer que la température d'antenne n'est pas non plus forcément l'information ultime pour la télédétection. Cependant, dans ce cas, il n'est pas dans le rôle de l'instrument de procéder à l'estimation (inversion) des variables, "ultimes", non directement accessibles, comme par exemple le profil de température de l'atmosphère.

2 : Quelques données sur POM 2 : TRDB ≈ 300 K ; hMB = 0,6 ; hf = 0,733 ; t dépend évidemment de la fréquence et du temps (qu'il fait...), et peut descendre jusque vers 0,05.

 

 

 

 

 

4. METHODES DE MESURE

Les méthodes utilisées pour les mesures des performances des mélangeurs et des récep­teurs sont en étroite relation avec les procédures d'étalonnage exposées au chapitre précédent.

A fréquence basse (largement au-dessous de 90 GHz), il est fréquent de faire ces me­sures avec un analyseur de bruit. Au-delà de 140 GHz, on ne peut plus employer de diode à bruit et l'on se reporte sur les absorbants comme pourvoyeurs de températures de bruit de ré­férence. De toute façon, les méthodes employant des charges absorbantes sont plus précises, même à basse fréquence. Mais nous allons voir qu'il est tout de même difficile d'obtenir des résultats très précis.

La procédure de base est couramment appelée la méthode du facteur Y. Soit à évaluer la température équivalente de bruit TR d'un récepteur. On présente devant le cornet à l'entrée du récepteur en état de fonctionnement (OL en activité) une source chaude (absorbant) de tempé­rature Tc ≈ 300 K. On relève le niveau Pc à la sortie de la chaîne FI. On répète la même opéra­tion avec une source froide, absorbant que l'on vient de tremper dans l'azote liquide, de tem­pérature Tf ≈ 77 K. On a donc :

 

 

                         

 

                                                                                  (36)

 

 

Comme dans le chapitre précédent, les définitions du gain G et de TR sont relatives à une bande double, ou à la rigueur à une bande simple dans la définition de Räisänen. Les tempé­ratures Tc et Tf sont évidemment identiques pour les deux bandes. Si l'on voulait écrire les expressions (35) relativement à une bande simple dans la définition courante, il faudrait mettre un facteur 2 devant Tc et Tf, et supposer par là-même que LRFSLMS = LRFILMI, d'après les relations (20) et (25).

On écrit alors :

 

 

                                                                                                (37)

 

                                                                                   (38)

 

 

Tc et Tf étant connus et Y mesuré, on calcule TR.

Pour réduire l'effet des erreurs de mesure, l'idéal est de choisir Tc et Tf pour que Y soit proche de 1 + Ö2 [Mumford & Scheibe, 1967].

Nous avons supposé qu'un wattmètre était placé en bout de chaîne FI. Sur un tel appa­reil, les mesures absolues sont peu précises. C'est la raison pour laquelle on se contente de mesures relatives, d'où l'introduction du facteur Y (remarquons que, par ce moyen, l'autre in­connue, G, est supprimée). Pour faire des mesures absolues précises, on ne peut employer simplement une chaîne FI terminée par un wattmètre. Il faut placer un véritable radiomètre étalonné, pouvant donner la valeur exacte du niveau de sortie du radiomètre testé. Cette solu­tion est décrite par Faber & Archer [1985]. Ces auteurs mesurent les caractéristiques d'un mélangeur en plaçant donc en sortie de ce dernier un radiomètre étalonné. En outre, ils pren­nent en compte les affaiblissements dans les liaisons RF et FI, et le facteur de réflexion à la sortie FI du mélangeur. Toute la procédure est pilotée par un micro-ordinateur.

Leur montage est donc assez lourd. Il ne se justifie pas vraiment si l'on cherche seule­ment à avoir une idée grossière des caractéristiques d'un récepteur ou à optimaliser certains de ses éléments. Les montages que nous allons décrire ont le mérite d'une relative simplicité de mise en œuvre. Ils ont chacun des avantages et des insuffisances.

Récapitulons. Nous savons mesurer le facteur Y donc la température de bruit TR du ré­cepteur. Il est par ailleurs facile de connaître la température de bruit TFI de la chaîne FI, par une mesure à l'analyseur de bruit ou en plaçant, à l'entrée de cette chaîne, une charge adaptée, chaude puis refroidie. Le produit du gain G et de la bande B de cette chaîne FI peut être estimé aussi avec l'analyseur de bruit. Il reste à déterminer les caractéristiques du mélangeur : LMDB ou LMS et LMI, et TM. Si l'on connaît LM, on pourra calculer TM par l'une des relations (16), (17) ou (18).

 

Une manière simple mais peu précise de mesurer LM est d'envoyer une puissance connue PRF à l'entrée du mélangeur. On relève le niveau Ps de sortie de la chaîne FI à l'analyseur de spectre. Si PRF est suffisamment élevée (pas trop cependant pour ne pas saturer le mélangeur : on doit toujours avoir : PRF << POL ; ni saturer la chaîne FI), on peut négliger le bruit propre du récepteur, et l'affaiblissement LM se déduit de :

 

 

                                                                                      (39)

 

 

Auparavant, il a certes fallu déterminer G de la même façon, mais avec la chaîne FI seule, sans mélangeur.

Ces mesures sont faites dans une bande étroite, en quelque sorte remplie complètement par PRF. B et G sont donc "séparés", alors qu'ils n'étaient pas séparables dans la méthode large bande du facteur Y.

Les affaiblissements LMS et LMI (pour toute la bande) sont évalués en répétant les me­sures à des fréquences nRF couvrant les bandes S et I.

Cette méthode exige de pouvoir déterminer, avec la précision voulue, des puissances absolues. Ps se lit à l'analyseur de spectre et PRF est obtenue par un bolomètre. Encore une fois, ces mesures sont peu précises, voire peu fiables.

 

Carlson et al. [1978] ont traité ce problème de la façon suivante. Au cours d'une pre­mière étape ils mesurent le rapport LMS/LMI. Pour cela, ils envoient les puissances PRFS dans la bande S (plutôt autour d'une fréquence de la bande S), puis PRFI dans la bande I. A l'aide d'un bolomètre dont la réponse en fréquence est connue, ils ont auparavant réglé les niveaux RF pour avoir PRFS = PRFI. Le rapport des niveaux de sortie — mesure relative — est alors égal au rapport cherché. Une deuxième étape comporte les mesures source chaude et source froide devant le mélangeur, et charge adaptée chaude devant la chaîne FI. Les deux facteurs Y, Pc /P(FI)c et Pf /P(FI)c, où P(FI)c est le niveau recueilli lors de la dernière mesure, permettent fi­nalement d'exprimer LMS puis TMSB-C en fonction du terme connu (1 + LMS/LMI).

 

Il existe une méthode (qui nous a été suggérée par L. Pagani) pour évaluer LMS et LMI sans utiliser de générateur de puissance RF. Il faut pour cela faire des mesures de type charges chaude et froide sur le récepteur normal, puis différencier les deux bandes du récepteur et re­faire une mesure avec la source chaude. Cette différenciation est obtenue en plaçant un filtre sélectif (type Fabry-Pérot) amenant, sur le mélangeur, une température froide dans la bande image et laissant passer la température chaude dans la bande signal. Après avoir écrit les équa­tions correspondantes, il nous est apparu que des mesures absolues sont nécessaires : on ne peut pas résoudre le système d'équations en recourant seulement aux rapports de puis­sances reçues ; cela quel que soit le nombre de mesures (à des températures différentes), car on ne peut écrire que trois équations indépendantes.

 

Enfin J.-C. Pernot, à l'Ecole normale supérieure, utilise une méthode simple pour dé­terminer l'affaiblissement de conversion et la température de bruit d'un mélangeur, en double bande. Le montage est indiqué sur la figure 5. La voie 1 est terminée par une charge adaptée dans une enceinte à température T' réglable. La voie 2 comporte le mélangeur et un cornet de­vant lequel on peut placer une source absorbante chaude ou froide.

 

 

 

 

Figure 5 : montage avec commutateur.

 

Il faut s'assurer que le commutateur a exactement les mêmes caractéristiques dans les deux voies, en particulier un très faible facteur de réflexion. On néglige les affaiblissements apportés par le cornet et les liaisons, ou bien on les prend en compte et l'on complique un peu le calcul si on les connaît.

– Le commutateur est placé en position 2. On présente la source chaude devant le cor­net. On repère le niveau de sortie. Le commutateur est alors passé en position 1 et l'on ajuste la température T' de la charge adaptée pour lire le même niveau de sortie — c'est un réglage relatif. Soit Tc' la température adéquate de la charge adaptée.

– On répète les mêmes opérations avec la source froide, d'où Tf'.

Les relations (40) permettent alors de calculer TMDB et LMDB :

 

 

                         

 

                                                                                  (40)

 

 

Cette méthode se rapproche de celle décrite par Maas [1986] (avec commutateur à trois positions), qui vise en fait, comme la procédure de Faber & Archer, à transformer la chaîne FI en radiomètre étalonné. Le défaut essentiel de ce genre de méthode est l'usage du commuta­teur, qui n'est jamais parfait.

Une méthode voisine consiste enfin à déterminer les températures de bruit TR(1) et TR(2) du récepteur pour deux chaînes FI de températures de bruit TFI(1) et TFI(2) différentes, puis à résoudre le système linéaire de deux équations (18) aux deux inconnues LM et TM.

 

 

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